Intrigue n°3 — ft. tous les membres

Dimanche. 11h. L'heure sainte. L'heure de la messe. Tous les villageois se réunissaient dans l'église du village pour prier. Bien sûr, les Loups-Garous n'y allaient pas, ils ne le pouvaient pas. Aujourd'hui, cependant, ils seraient forcés de pénétrer dans l'espace saint de l'église. Salomon en avait assez de vivre dans ce village perdu au fin fond de la campagne anglaise. Il voulait retrouver le luxe de son hôtel particulier, au plein cœur de Londres, près de Buckingham palace, près du roi. Il était temps que sa mission sacrée touche à sa fin. Il était temps qu'il purge ce village de ses Loups-Garous.
Salomon jeta un regard circulaire sur l'église. Lieu saint. Il n'allait pas le souiller en faisant entrer des êtres méprisables, indignes de Lui. Le procès se fera sur le parvis de l'église, devant Lui. Un rictus se dessina sur son visage. Bientôt. Bientôt sa mission toucherait à sa fin. Bientôt il pourrait quitter ce village moisi, ces villageois. L'horloge indiqua 10h55. Salomon se décida à sortir. Il lui fallait tout préparer. Il s'empressa de remplir une bassine de pierre d'eau bénite et alla la déposer dehors, sous le porche, à l'abri des regard. Il déposa une bague en argent au fond de l'eau ainsi qu'un petit poignard à la lame d'argent. Puis il s'enveloppa dans sa grande cape rouge et se posa, bien à la vue de tous, en attendant. La cloche de bronze se mit en branle et sonna les onze coups. Lourds, pesants. Décisifs.

They are guilty

Shakespeare Jillian McCartney

Heaven Stella Christobald

Alexandra Sara Hearhood

Lewis James Carter

Faith

Fait à DAGGERHORN en l'an de grâce 1522

Moi, Père Esmerald Salomon, Prêtre au service de Sa Majesté, le Roi Henri VIII, Roi d'Angleterre, Seigneur d'Irlande, Prince de Galles, et de Notre Seigneur, j'accuse. J'accuse les villageois suivants de trahison envers la couronne et l'Église. J'accuse les villageois suivants d'être des fils et filles du Malin, de vouloir corrompre les braves gens, de vouloir tenter les fidèles dans un monde de débauche et de luxure.

La justice divine sera exécutée de par la sentence juste : la mort. Mais avant d’exécuter Sa justice et de délivrer l'Angleterre de créatures impies, la justice royale sera honorée. Les prisonniers seront questionnés afin de leur laisser une dernière chance de rédemption dans l'espoir qu'Il les accueille comme de justes pêcheurs repentis. Ils seront interrogés dans l'espoir d'obtenir des aveux, des confessions sur les noms de leurs frères impies.

De part la justice divine et royale, le village de DAGGERHORN sera délivré du mal qui les ronge depuis plusieurs générations : les Loups-Garous. Que le Ciel délivre leurs pauvres âmes tourmentées, corrompues, que le Ciel ait pitié d'eux.

L'interrogatoire sera fait en place publique, à la vue et au su de tous, en guise d'avertissement. Si quiconque possède la moindre information concernant les fils du Malin, qu'il parle sans crainte, tout courage aura sa juste récompense. Quiconque tentera d'aider les prisonniers sera coupable de trahison envers la couronne et Sa Seigneurie. La peine encourue pour trahison est la même : la peine de mort par décapitation.

Père Salomon

BEWARE, THE WOLF IS COMING

Je descendais les marches rapidement et passais derrière le comptoir pour attraper une pomme après avoir rapidement salué Adélaïde. Nous essayions de ne pas paraître trop proches depuis que le Prêtre avait commencé ses enquêtes... Mais aujourd'hui, tout allait changer. Il avait annoncé des noms que je trouvais un peu choisis au hasard. Sauf pour le mien. J'étais accusé d'être un loup, je n'en croyais pas mes oreilles. Tous les dimanches, j'allais à l'église pour que les villageois nous fassent confiance, à Chris et à moi, mais non, ce n'était pas une preuve suffisante pour Monsieur. S'il voulait se venger de quoi que ce soit, qu'il le fasse seulement avec moi, ou qu'il me provoque en duel. Mais s'en prendre à des innocents, pour certains j'en suis sûr, simplement pour retrouver une place importante dans l'estime du roi... C'est une bien basse manœuvre. Je quittais l'établissement, comme les autres, le rendez-vous étant devant l'église. Je me trouvais particulièrement calme pour quelqu'un qui allait peut-être perdre la vie, mais cet homme était si fou, que j'étais sûr ou presque, qu'un évènement quelconque allait se passer et tout chambouler. Il ne pouvait pas arriver à ses fins de cette manière. De toute façon, ma mort ne provoquerait que la sienne, condamné par celui qu'il cherche à impressionner. Plusieurs habitants étaient déjà là, et je m'avançais jusqu'au premier rang, lui faisant face. Il voulait tuer cinq personnes ? Qu'il le fasse, et il mourra aussi.

La journée avait commencé normalement, et pourtant, j'avais le sentiment que rien n'était normal. Le Père Salomon avait terminé ses enquêtes préliminaires. Il était arrivé à une liste de noms, une liste de cinq noms. Je n'avais aucune idée de la manière qu'il avait eu pour les obtenir, mais je savais que nous avions chacun été interrogés, plus ou moins durement. Lorsque mon tour était arrivé, j'avais appliqué ce que Shakespeare et moi avions décidé de faire. Réussir à montrer que rien ne nous unissait, rien de spécial à part la relation d'un client avec le maître de l'auberge. J'avais demandé à Shake ce qu'il en avait pensé, et il avait semblé moyennement satisfait. C'était jusqu'à ce que l'on apprenne que Salomon avait les cinq noms. Shakespeare descendit de sa chambre, attraper une pomme rapidement. Je le saluais d'un signe de tête. Même si nous nous étions mis d'accord sur la marche à suivre, j'avais du mal à rester aussi peu proche de lui. Je le suivais bientôt, suivant le mouvement de foule qui accompagnait chacun vers l'extérieur. Les cinq noms, je les connaissais, parmi eux figurait celui de Shakespeare. Ils étaient accusés d'être des loups garous. Si je savais que cela n'était pas le cas de Shakespeare, je ne savais pas pour les autres. Mais à quoi jouait Salomon? Il y avait des témoins qui pouvaient confirmer que Shakespeare était là, be let bien humain pendant les attaques. Je m'avançai, restant dans la masse de villageois, fixant cet homme drapé de rouge d'un oeil sombre.

Une nouvelle journée qui commençait. Un dimanche. Sauf que ce n'était pas une journée agréable. Aujourd'hui était le jour où cet imposteur de Père Salomon allait dévoiler sa "liste". J'en connaissais déjà le contenu, tout comme Erwan, notre chef. Et ce contenu ne me plaisait pas du tout. J'étais accusé. Insensé, n'est-ce pas ? Mais ce "Père" Salomon était insensé. J'arrivai devant l'église l'air grave, le regard déterminé. Qu'il tente donc de me faire passer pour un loup ! Il allait voir de quel bois je me chauffais. Je m'avançai, regardant le petit attroupement de villageois. Ils allaient arriver, il fallait leur donner du temps. Plus ils étaient nombreux, plus il y aurait de témoins, plus il nous serait facile de discréditer cet hurluberlu en cape rouge mitée. Je me faufilai jusqu'au premier rang, à côté de Shakespeare. Arrivé dans l'année, comme moi, il était lui-aussi accusé. Nous étions cinq accusés. Cinq innocents. Un instant je pris à songer à quel effet cela ferrait-il si, soudainement, l'un d'entre nous s'avançait pour coller une bonne droite à ce "Père Salomon". Rien, sans doute, à part un immense bien à tous les villageois. Pensif, maussade, j'attendis en braquant mon regard sur lui, lui faisant passer toute ma haine.

J'étais en pleins travail, nous étions en pleins travaux quand les cloches se mirent à sonner. Tout de suite, nous cessâmes nos gestes et nos regards se sont croisés. Les enquêtes du Père Salomon était terminé et il venait juste de dévoiler sa liste. Certaines d’entre nous étaient devenue blême, dans leurs regards se lisaient la peur. Moi aussi j'avais peur mais, aussi impatiente d'aller voir cette liste de la mort. Enfin, la patronne sortit de son bureau et nous regarda avant de nous donner l'autorisation de voir cette fameuse sentence. Très vite,nous quittèrent l'atelier et nous nous dispersèrent pour aller sur la place du village. Beaucoup de monde était déjà présent. Je ne vis quelques connaissances,je me faufilais parmi les autres comme toutes les fileuses. Enfin, nous arrivèrent devant la liste. J'eu peur d'y jeter un regard, d'y voir un nom, mon nom. Je fermais tout d'abord les yeux puis, la curiosité eut raison ma peur. Cinq personnes, cinq innocents. Shakespeare Jillian McCartney,Heaven Stella Christobald,Alexandra Sara Hearhood,Faith et...grand dieu ! Je deviens subitement aussi pâle que la mort. On me poussais, je m'écartais en reculant de cette foule..mes mains tremblais. Un nom que je connaissais bien était présent sur cette liste...Lewis. Mon seul ami en-dehors de Destiny.. il m'était aussi précieux qu'elle et ce n'était qu'aujourd'hui, quand on m'annonce sa mise à mort que je m'en rendait compte. Or, malgré mon immense tristesse, je sentais que le Père Salomon se tromper. Non ! Lewis ne pouvait pas être un Loup-Garou ! Il combattait c'est personne là (pour mon plus grand malheur), comment pourrait-il être un loup ? Je croisais les bras autour de moi, des frissons me parcouraient tout le corps, rien avoir avec le froid. Je regardais autour de moi et vit Lewis. Il fixé le Père Salomon, je voulus m'approcher mais, il était trop loin puis, le prêtre habillé de rouge comme le sang attiraient tout les regards haineux sur lui. A mon tour je porta mon attention mon humeur ressemblais à celle de tout les autres, sombre et vengeresse.

Mon frère et moi venions d'arriver dans ce petit village. Nous nous étions installés à l'écart, dans la maison dans la forêt. Curieuse, je furetais partout, essayant de rencontrer les gens, de me faire des amis. C'était pas facile. Ce matin, pourtant, j'en avais parlé à mon frère. Je lui avais dis que je voulais pas être seule et que j'avais entendu que les villageois allaient se rassembler sur le parvis de l'église. C'était une bonne occasion de se présenter. Il avait accepté assez froidement. Je savais qu'il avait autre chose à faire. Sauf que voilà. Lorsqu'il apprit que le Père Salomon allait être là, il avait tout de suite changé de regard.

J'étais là, en retrait, sagement postée à côté de mon frère, regardant les villageois qui s'approchaient. Je ne comprenais pas leur agitation, leur trouble. J'attendais que quelque chose se passe, que quelqu'un parle. J'attendais de comprendre. Je vis des gens arriver, portant des capes rouges. Je n'aimais pas les Red Riding Hood. Je fixai mon regard violet sur le Père Salomon, attendant qu'il parle. J'étais curieuse.

J'étais sortie précipitamment, laissant en plan ce que j'étais en train de faire. D'habitude je rechignai à aller à la messe. Je n'aimais pas y aller. Aujourd'hui c'était très important. Aujourd'hui nous allions enfin connaître les "suspects" de cet abruti de Père Salomon. J'avais très envie de lui retourner ma façon de penser mais, vu comment mes frères avaient réagi la première fois ce n'était pas une très bonne idée. Et puis, Erwan m'avait assuré que la famille Blacksmith serait soigneusement tenue hors de toute cette histoire de liste. Ça n'empêchait pas le fait que je puisse m'inquiéter quand même.

En arrivant devant l'église, je m'aperçus que plusieurs personnes étaient déjà là. Je repérai Annabelle mais ne vis aucun de mes frères. Ils n'étaient pas encore arrivés, c'était tout. Je ne remarquai ni Jack, ni Peter non plus. Jack n'allait sûrement pas venir, mais... s'il était suspecté ? Je me faufilai à côté d'Annabelle et serrai sa main pour lui donner du courage lorsque je vis qu'elle était blême, passablement angoissée. Ses yeux, fixés sur Salomon, allaient et venaient, furtivement, du menteur à un Red Riding Hood au premier rang, pas très loin de Shakespeare. Je gardai mes questions pour moi et posai mes yeux sur l'autre imbécile, celui à la cape défraîchie, le foudroyant du regard aussi fort que je le pouvais.

Le père Salomon n'avait rien fait de probant depuis son arrivée fracassante quelques mois plus tôt. Il avait promis de nous débarrasser des loups-garous, mais il fallait reconnaître qu'il n'était pas plus efficace que les autres RRH qu'il s'était tant appliqué à dénigrer. Ils faisaient tous un boulot difficile et je me demandais comment se passeraient les choses si jamais ils n'étaient pas dans le village. Y aurait-il plus d'attaques ? Moins ? Étaient-ils un bouclier ou bien, au contraire, une raison pour les loups d'attaquer, par pur défi ?

Voilà bien une question à laquelle il était difficile de répondre, mais en attendant, aujourd'hui, le Père Salomon avait décidé de haranguer la foule et de livrer sa liste de loups-garous. Je fus surpris par certains noms, et déçu que d'autres n'y figurent pas. Comme Jack par exemple. Mais à côté de ça, je ne pouvais m'empêcher de me demander sur quel base il avait établi cette liste... Des rumeurs ? Des délations ? Ou des preuves concrètes ? Que l'un des envoyés du roi soit dans cette liste était plus qu'étonnant. Qu'un RRH y figure l'était davantage encore. Heaven l'herboriste, était aussi citée. Pourquoi pas, elle pouvait bien être un peu sorcière cette fille...

Et puis, il y avait Faith aussi, cette sale petite voleuse à qui j'avais bien failli couper la main. Et enfin, il y avait Alexandra et là, je n'étais pas d'accord du tout. Je serrai les poings, approchant et avisant Destiny qui était déjà dans la foule. Je ne voyais pas Harry encore. Quant à Erika, elle était invisible. Sa grossesse avançait et le terme approchait, me rendant de plus en plus nerveux.

Nous nous trouvions sur le parvis de l’Église et nous allions assister à un procès, celui de loups garous mais aussi, peut-être, d'innocents... Je me rapprochai de Destiny, qui semblait soutenir Annabelle, la soeur de Peter et futur belle sœur de Destiny finalement. Calme, je regardais la foule, même si, intérieurement, je bouillonnais. Alexandra n'était pas un loup garou c'était impossible...

Comme chaque dimanche, j'assistais à la messe. Quelque part, je me disais que j'étais la plus terrible des hypocrites à jouer les vierges pleines de pureté. Parce que mon âme était vouée aux enfers alors que je m'autorisais des plaisirs interdits avec mon frère. A chaque fois que je me donnais à lui, j'offrais mon être au Malin, chaque fois davantage. J'étais toujours convaincue que j'allais brûler en enfer, mais je n'avais plus la force de résister à la détermination de mon frère.

Le Père Salomon se trouvait sur le perron de l’Église et il annonça à tous qu'il avait enfin trouvé des loups-garous et qu'après un procès, ils seraient condamnés à mort. Un procès ? Pouvait-on parler de procès quand on voyait la haine dans son regard, quand on voyait combien il avait hâte d'accomplir le sentence ?

Les noms qu'il citait je les connaissais. Si je me fichais du RRH et de l'envoyé du roi, les noms de Heaven, Alexandra et Faith, en revanche, m'étaient douloureusement familiers. Je refusais de penser qu'elles puissent être coupables. Je sentais la haine, partout autour de moi, et pas forcément contre les présumés loups-garous. Mais contre cet homme qui était venu pour nous aider.

Heureusement, Jaimie ne faisait pas partie des suspects. Mais Alexa si, et ça... Non, ce n'étaient que des bêtises ! J'approchai de mon amie et posai ma main sur son bras avant de lui murmurer :

- Ce type est fou. On ne le laissera pas vous exécuter !

Je levai un menton volontaire vers le père Salomon, avant de lancer d'une voix claire et contre toute prudence :

- Et quelles preuves avez-vous de la culpabilité de ces hommes et de ces femmes ? Qui vous a donné ces noms ? Sottises que tout cela, je peux répondre d'Alexandra, elle n'est pas un loup-garou !

Si personne n'avait osé broncher, moi, j'osais. Sans agressivité, avec ma voix douce, mais aussi avec une certitude inébranlable.

- C'est cela votre justice ? Menacer de mort quiconque osera défendre des innocents ?

C'était n'importe quoi. Un décret imbécile. Des accusations basées sur quels fondements ? Mais ce poser ce genre de question ne servait a rien. Je m'étais rendu a l'endroit avec Grace, restant un peu en retrait, les mains enfoncées dans mes poches. Heureusement qu'aucun de nos noms n'avaient été donnés sur cette foutue liste. Peut être que notre fortune faisant office de bouclier, je n'en savais rien. Toujours est il qu'on aurait droit a une exécution sommaire si ça continuait et ce, sans même avoir la preuve que l'on ai tuer des loups.

Je connaissais certains noms et j'avais souris légèrement. Ben voyons..Combien de loups réels dans cette liste ? A tout les coups aucun. J'étais curieux de savoir comment le Père Salomon allait se sortir de ce bourbier fini. A moins de tuer tout le village évidemment, mais ce n'était sans doute pas une idée a lui donner.

Un magnifique dimanche a n'en pas douter. L'oeil sombre, le regard rivé sur la liste, je repérai certain RRH. Tiens, même eux étaient accusés. Hilarant.

Je sursautai alors que Grace s'avançait soudainement, indignée et je sortis les mains de mes poches. Non, elle n'allait pas...Et bien si. Crispant soudainement les mâchoires, je fondis sur elle, la saisissant par un poignet avant de la faire reculer.

"Tu veux te faire tuer ou quoi !?"

Sifflai je en la repoussant dans le public avant de la garder fermement contre moi.

"Ce type n'écoutera rien ni personne, tout ce que tu vas y gagner c'est d'y passer aussi. Idiote."

rugissai je entre mes dents a voix basse.

"Reste tranquille."

Incrédule, je regardai la liste déployée. Mon nom. Mon propre nom y figurait. Parmi d'autre que je connaissais aussi. Pâle et les yeux agrandit d'effroi, je contemplai le Père Salomon arguer la foule a ce procès. Un procès inégale, je le savais déja. Si certain était innocent, ce n'était pas mon cas. Debout dans l'église, le corps parcouru d'une douleur que j'avais appris a maitriser, je serrai les doigts de Seth a m'en faire mal.

Voilà, c'était fini. J'allais mourir. Juste comme ça. L'air me manquait et il me semblait que l'espace se réduisait soudainement. Il y a peu, j'allais me marier, fonder ma propre famille. Il y a peu, j'avais tout pour être heureuse. Aujourd'hui, j'allais juste mourir.

Je ne pourrais pas passer l'interrogatoire. Certain signe ne trompait pas. J'étais là, dans l'église mais je pouvais supporter la douleur qu'elle provoquait. Mais jamais je ne pourrais mentir sur le contact de l'argent. Jamais...Mon regard accrocha Erwan...Peut être devait il rire intérieurement. Il avait exactement ce qu'il voulait...Et je me mis a trembler...Il était inutile pour l'instant de clamer mon innocence. C'était peine perdue. Tout était terminé...Je levai un regard vide sur le visage de Seth avant de le lacher doucement.

Il ne pourrait rien faire pour moi et je refusai qu'il risque sa vie pour quelque chose déjà entendu. Certain s'éloignèrent de moi avec des mines horrifiées, certain murmurait, affirmant qu'ils avaient toujours su que j'étais une sorcière. Un esprit du Malin. Ce n'était que justice. Mais je ne m'écroulerais pas. Je ne leur donnerais pas cette satisfaction. Je ne pleurerais pas non plus. Ni ne hurlerais.

Je levai le menton, regardant le Père Salomon droit dans les yeux, sans ciller.

Qu'il en soit ainsi.

C'était un cauchemar.

J'avais l'impression que le sol se dérobait sous mes pieds. Que le Père Salomon débusque des loups-garous, c'était son travail, mais jusqu'ici, il avait été aussi incompétent que les autres, si bien que je ne m'étais pas inquiété pour la sécurité de Heaven. Je la savais inoffensive, je savais qu'elle faisait attention à s'éloigner les nuits de pleine lune pour ne blesser personne et voilà qu'elle se retrouvait dans cette terrible liste qui la condamnait à mort.

Mon estomac se contracta violemment de terreur et d'angoisse alors qu'elle me serrait la main à la broyer. Je savais qu'être ici était un calvaire, qu'elle endurait courageusement pour donner le change, mais si jamais le Père Salomon décidait de vérifier ses dires, la vérité éclaterait au grand jour. Je ne voulais pas la perdre, pas alors que l'avenir nous ouvrait les bras.

La foule était muette, puis elle commença à s'agiter, doucement, puis cela monta crescendo alors que certains s'écartaient précipitamment des accusés. Heaven était une cible privilégiée, elle qui était déjà marginale de par son métier. Elle me lâcha alors la main, m'écartant de son destin par la même.

Je la rattrapai pourtant, avant de la forcer à me faire face. Je lui chuchotai furieusement :

- Je ne te laisserais pas Heaven...

Mais que pouvais-je bien faire ? Comment la sauver ? Nous enfuir ? C'était trop tard, c'était bien trop tard. Abby était avec Henry, et heureusement. Il n'aurait pas compris.

- Je refuse de te laisser mourir...

Ma voix se brisa. Pas elle, pas alors que nous avions tant à construire.

Moi, accusée d'être une louve !

J'avais hésité. Hésité entre le rire et les pleurs. Le rire parce que c'était ridicule, que plusieurs personnes savaient que je ne pouvais pas être une louve, que j'avais Lewis et Chris pour m'aider... Et puis les pleurs, en une façon de parler, parce que force m'était d'admettre que j'avais peur. Au contact de Chris, j'avais appris à ne plus refouler mes sentiments, à les accepter et à les connaître, parce que c'était une méthode bien plus efficace pour ensuite pouvoir les ignorer. Si je les repoussais au fond de moi, ils risqueraient à tout moment d'exploser, pas si je savais qu'ils étaient là et apprenais à vivre avec, les comprendre, pour mieux les annihiler. Cependant, cette crainte-là, j'avais vraiment beaucoup de mal à la tolérer. Je la trouvais puérile... et en même temps...

J'avais peur parce que Lewis, lui aussi accusé, ne serait pas en mesure de me protéger. J'avais peur parce que j'ignorais si Chris voudrait encore de moi après ça, après que j'aie autant attiré l'attention. C'était une peur stupide quelque part et pourtant je ne pouvais m'en défaire. J'avais peur... J'avais peur aussi parce que quand bien même les villageois un peu censés savaient que je n'étais pas une louve, en revanche, beaucoup d'entre eux pensaient que j'étais leur complice. Que je les aidais à s'introduire dans le village, que j'attirais les enfants dehors, en échange de leur protection, détournant les rondes des Red Riding Hood que j'étais la plus à même de connaître. Une si frêle enfant qui avait survécu si longtemps en vivant dans la rue ? Allons, c'était impossible, ce ne pouvait être uniquement grâce à mon adresse... Je ne voulais pas que ces soupçons remontent, ou je savais que malgré tous mes efforts à me réhabiliter, je connaîtrais à nouveau les jets de pierre.

Mais que pouvais-je faire d'autre en vérité, à part simplement attendre ?

J'étais venue parce que c'était dimanche, parce que ça se passait à l'église, parce que j'étais terrifiée par cette aura d'étrangeté qui entourait le père Salomon et cette chasse qu'il avait lancée, que je ne comprenais pas. Que cherchait-il ? Que voulait-il ? Pourquoi était-il venu au village faire le travail pour lequel les habitants avaient déjà une armée complète ? Je ne savais pas qui était cet homme et je ne parvenais à déterminer si on le prenait réellement au sérieux ou s'il n'y avait que moqueries à son égard. Peu importait. Je sentais que c'était une cérémonie importante qui allait se passer là, quel que soit le sérieux de l'homme. Et je ne pouvais ignorer que des gens allaient être accusés d'une crime gravissime, qui leur vaudrait des tortures certainement et ensuite la mort.

Je ne connaissais aucun des accusés mise à part l'herboriste, taxée de sorcellerie par les racontars et dont la présence dans la liste ne me surprenait guère, et Alexandra, que je connaissais peu mais qui inspirait confiance et que je savais amie de Grace. Voir ce nom me glaça le sang. Je regardai Heaven Christobald. Ses longs cheveux noirs comme l'enfer et ses yeux bleu glace la rendaient lointaine, intouchable, et je comprenais aisément qu'on l'accusât de sorcellerie - ce qui, à Daggerhorn, redirigeait presque automatiquement vers les loups-garous, cette race haïe et sanglante. En revanche, Alexandra Hearhood... Je savais que Grace ne supporterait pas de voir son amie sur l'échafaud, et, à ses côtés, je sentais sa tension alors qu'elle découvrait les noms.

Je n'avais pas du tout prévu qu'elle ouvre la bouche à l'encontre du père Salomon, en revanche.

- Oh, Grace... gémis-je, frémissante de peur, alors que je sentais le froissement du tissu de sa robe contre ma main tandis qu'elle s'élançait au devant, confrontant le prêtre.

Je lui empoignai fermement le bras, jetant un regard de reconnaissance à son jumeau, sans vraiment savoir s'il le remarquait. Encadrée entre nous deux, bien que je fusse plus frêle qu'elle, au moins ne pourrait-elle plus bouger.

- Écoute Jaimie, il a raison ! Tu n'as pas à t'en faire. Dieu protégera les innocents.

Accuser un de mes hommes ? Mais pour qui se prenait-il ? Ce type était totalement à côté de la plaque. J'avais passé des nuits de pleine lune avec Lewis, depuis la dernière lune rouge aussi, je savais pertinemment qu'il n'était pas un loup-garou. Accuser ce voyageur que nul ne connaissait, qui n'était même pas un habitant de la ville ? Mais qu'importait ! Ce n'était pas d'eux dont il fallait se venger, c'étaient ceux qui faisaient partie du cœur du village depuis longtemps maintenant. Eux, s'il le fallait, nous n'aurions aucune difficulté à nous en débarrasser - et puis finalement, que m'importais-je ? Dans la liste donnée, j'étais convaincu de l'innocence de quatre personnes. Nous avions mené l'enquête sur McCartney et Bingley, la voleuse nous ennuyait suffisamment dans nos rondes à chaque pleine lune pour que je sache qu'elle était bien humaine, je pouvais répondre de Lewis et la petite Hearhood était libre de tout soupçon - je l'avais déjà vue dans l'église, manipuler des pièces d'argent même si sa famille en recevait beaucoup moins que les Turner, autant de petits indices par-ci par-là qui ne prouvaient rien mais me permettaient d'être pratiquement sûr de son innocence. Il n'y avait que pour Heaven qu'il avait tapé juste.

En gros, il avait trouvé la seule louve que je ne voulais surtout pas voir capturée. A croire qu'il le faisait exprès pour m'emmerder !

Soyons clairs, devoir assister à cette foutue cérémonie d'accusation, ce procès, et tout le bordel qu'il avait organisé me gonflait royalement, mais en vérité cela m'avait au moins permis de réfléchir à comment sauver Heaven. Sauver Heaven ? Et pourquoi donc ? Je n'avais hélas pas le choix, malgré toutes les fois où j'avais tenté de la perdre, parce que je ne pouvais prendre le risque qu'elle dénonce ma Zoey. J'avais trouvé une solution toute simple en sachant les moyens qu'il comptait utiliser pour les mettre à l'épreuve. Je ne me faisais pas de souci pour l'église, elle savait y résister et c'était grâce à moi, finalement, mais elle ne pourrait cacher les brûlures de sa peau face à de l'argent ou de l'eau bénite.

L'argent, je pouvais m'en occuper. Pas l'eau bénite. Alors j'avais été voir Sixte, et sans lui donner de détails, je lui avais dit de faire diversion. « Trouve une solution, n'importe laquelle, pour que l'eau bénite soit rendue impure et pour que les regards soient attirés ailleurs, même pour une seconde seulement. » Il ne m'avait pas dit comment, mais il m'avait affirmé qu'il avait une solution, et contre toute surprise, je ne lui avais pas demandé les détails, m'exhortant à lui faire confiance.

Alors nous étions tous là, à l'église, attendant le procès de cet imbécile en cape rouge. Et dans ma poche, mon index allait et venait sur l'alliance d'or blanc que je destinais à Zoey pour notre mariage, et qui aujourd'hui servirait à sauver Heaven...

Cela avait été bref, mais j'avais compris que Sixte voulait absolument que je fasse diversion. Je n'en savais pas plus et franchement, je m'en fichais. Je voulais absolument faire en sorte que cet homme ridicule se rende compte de sa bêtise. En effet, j'avais été accusée d'être une louve. Moi, une louve ? Ok, j'aurais sans aucun doute accepté que mes frères en soient, je les aurais même protégés, mais là, j'avais besoin de me défendre. C'était sûr. Je n'allais pas le laisser faire mumuse avec moi juste pour le plaisir de le satisfaire.

Il commença donc à jouer les grands et bien rapidement des personnes commencèrent à exprimer leurs avis. Bien rapidement, je fus défendue par mon amie et même dans le regard de Robyn, je découvris un soutien. Je m'excusai silencieusement auprès d'eux pour la suite. Mais je savais que cela suffirait à détourner l'attention. Et puis dans le fond, ceux qui me connaissaient assez pourraient comprendre et me reconnaître en cela. Ainsi, lorsque tout le monde cessa de parler, je levai les yeux vers Salomon, m'inclinant faussement avant de le regarder, un sourire aux lèvres.

— Je crains que vous ne soyez totalement sénile…

Portant une main à ma poitrine, je repris la voix un peu tremblante.

— Comment pourrais-je être un loup ? Regardez dans mes yeux !

Une main glissa alors sur mon corsage et je tirai sur la petite ficelle. Je fis alors glisser ma robe le long de mes épaules avant d'ôter tous les vêtements en quelques mouvements d'une extrême sensualité.

— Mais puisque vous n'êtes pas le plus fin des inspecteurs, je vais vous aider !

Je me déplaçai d'un bond jusqu'à la bassine d'eau que je me renversai entièrement sur le corps. Laissant ruisseler l'eau le long de chacune de mes courbes, je me penchai pour remettre la coupe au sol. Me relevant dans un sourire, je me retournai vers lui et les autres, visiblement outrés/captivés/fascinés, rayez la mention inutile. Arquant un sourcil, je m'avançai vers la foule avant de me retourner vers Salomon.

— Ai-je l'air d'une louve ? Non, alors cessez de nous ennuyer avec vos accusations douteuses !

Je l'avais retrouvé. J'avais enfin retrouvé ce lâche. Ce lâche de Père Salomon. Lorsque j'avais ouï dire qu'il s'était installé à Daggerhorn pour quelques temps afin d'épurer ce village de la race représentante du malin, je m'étais précipité d'y aller entraînant ma sœur avec moi. Ainsi, nous étions arrivés sous peu et ne connaissions personne, ce qui ennuyait fortement Cersei. Alors ce matin, elle avait entendu parler d'un rassemblement des villageois sur le parvis de l'église et s'était mise en tête d'y aller pour se faire des amis. Mouais... pourquoi pas ? Je n'étais pas réellement convaincu mais je me disais qu'en y allant nous pourrions nous faire quelques alliés. Jusqu'à qu'une certaine information arrive à mon oreille, le Père Salomon était de la partie et c'était lui qui organisait ce rassemblement! Cette fois-ci, impossible de le louper, je voulais le voir, je voulais savoir ce qu'il mijotait.

Nous étions donc là tous les deux attendant qu'il se passe quelque chose. Les villageois qui arrivaient, semblaient cependant tourmentés. Et c'est alors que je compris, par l'attitude de certains et notamment d'une jeune créature non pudique, que le Père Salomon avait vraiment décidé d'exterminer des loups. Mais une chose me turlupinait: pourquoi ne pas avoir agi dès le début comme avec notre famille ? Pourquoi ne choisir que des villageois en particulier dont il n'était pas forcément sûr qu'ils soient loups-garous ? Quel était son but ? Je cogitais dans mon coin à propos de cette attitude étrange tout en observant attentivement les moindres faits et gestes de ce prêtre afin de repérer le moindre indice qui l'aurait trahi.

Ils étaient nombreux à être venus. Salomon ne pu s'empêcher de sourire d'un air supérieur. Ils n'avaient pas supporté de le voir arriver, débarquer dans leur petit village perdu au beau milieu de la campagne, ils n'avaient pas accepté de le voir prendre les choses en main, ils n'avaient pas souffert de le voir mener son enquête avec minutie, n'omettant rien. Et pourtant, les voilà tous, réunis devant lui, prêts à écouter ce qu'il avait à leur dire. Il les balaya du regard. Misérables pourceaux, ils vivaient dans le péché. Un jour il reviendrait pour régler cette affaire, il les condamnerait tous, jusqu'au dernier, et ils iront tous brûler en Enfer. Mais, avant, il lui fallait finir ce pour quoi il était venu.

Il s'apprêta à parler, à faire son discours, lorsqu'une jeune fille s'avança, se dénuda entièrement et le provoqua. C'était une de ses coupables, une de ses suspects. Il fronça les sourcils et marcha droit sur elle, la saisissant violemment par le poignet. « Voilà la preuve de leur hérésie ! Créatures impies, imparfaites ! Et vous acceptiez de vivre avec ça dans votre village, de fermer les yeux !? Misérables ! Il vous punira tous ! » Tout en parlant, il la secouait, et, dégoûté, il la lâcha et s'avança face à la foule. Il leva les bras. « Pardonnez et il vous sera pardonné, dit la Bible. Vous pouvez tous avouer vos péchés, demander grâce, vouloir l'absolution, la rédemption ! Vous pouvez tous entrer dans Son royaume. Tous, sauf eux ! Il est de mon devoir de vous purger. »

J'avoue avoir été étonné par la demande d'Erwan, mais il devait avoir ses raisons. Et je me doutais bien que cela était en rapport avec Heaven. Alors, je lui affirmai qu'il aurait bien sa diversion. Ainsi, je m'approchais d'Alexandra en lui faisant part de ma demande. Je la connaissais assez pour savoir qu'elle saurait faire ce qu'il fallait. Ainsi, ce ne fut qu'à moitié étonné que je la vie se dénuder et ridiculiser un Salomon qui n'était visiblement pas heureux de cela. Il affilia alors Alexandra au démon et je dus me faire violence pour ne pas intervenir.

J'étais un loup, s'il me prenait en exemple j'étais mort. Je devais faire profil bas. Fixant alors Heaven, espérant qu'elle ne dirait rien et ne ferait rien. Sa vie en dépendait, elle devait se contenter de rester ou elle était. Nous avions la situation bien en mains. Pourtant il restait le problème des bénitiers de l'église et ça, je me voyais mal les souiller. Comment ? Comment faire ?

Je n'aimais guère la situation, je voulais que cet homme parte et nous laisse tranquille... Car rien de bon sortirait de cette conversation. Rien de concret. Je me demandais bien ce qu'allait faire Erwan, mais pire, je me demandais comment Alexandra allait-elle se défendre face aux hérésies de Salomon. Elle savait se défendre, mais je n'étais pas sur qu'elle puisse lui faire face plus longtemps. Elle était une femme d'honneur et je craignais que l'amour qu'elle portait à sa famille ne la fasse reculer. Je l'admirais dans un sens.

Je n'avais pas désirer y aller, mais Lewis étaient dans la liste, mon frère, mon meilleur ami. Comment avait-on pu croire à pareil chose ? Alors, contre toute attente, je finis par me rendre sur le parvis de l'église. Ma grossesse m'épuisait grandement, mais je bénéficiais d'un certain avantage, celui de demeurer fine malgré la vie qui grandissait dans mon ventre. Certes mon ventre ne pouvait faire illusion.

Les esprits s'échauffèrent bien rapidement et il ne fallut pas longtemps pour qu'une jolie brune ne se dénude entièrement aux yeux de dieu et à nous yeux. Elle prouva son innocence, mais rapidement, l'homme d'église l'arrêta d'un gestes pour la désigner comme une créature impure. Je fus outré, bien plus que je ne l'aurais cru. Cette pauvre enfant venait de s'innocenter et il ne semblait vouloir l'écouter. Ce fut alors que je ne pus tenir mes mots.

— Vous n'avez pas honte de forcer une pauvre créature à s'exposer ainsi pour prouver son innocence ?!

J'aurais voulu couvrir cette pauvre créature, mais je ne pouvais. J'avais fait assez de bruit en tombant enceinte hors mariage. Toutefois, cela ne m'empêcha pas de parler à nouveau.

— Je vois surtout la preuve de votre échec !

On pouvait dire qu'un silence de mort s'était abattu sur le village alors que les noms des présumés loups-garous étaient exposés au su de tous. La menace du Père Salomon de décapiter quiconque s'opposerait à lui marquait suffisamment les esprits pour tenir tout le monde tranquille, mais, contre toute attente, une première voix s'éleva, féminine. Surpris, je remarquai que c'était la fille du Maréchal Ferrant qui s'était ainsi exprimée, bien vite calmée par son frère et la jeune Vittoria, l'étrangère ramenée ici par Rafael Kane. Je ne pouvais que reconnaître du courage à cette fille. Courage ou stupidité, je ne savais pas bien. Mais j'étais soulagé que ce soit elle qui risque les foudres du prêtre et pas Destiny, qui avait elle aussi le chic de s'exprimer quand il valait mieux se taire.

Je ne voulais pas qu'Alexandra soit tuée pour une accusation fallacieuse, mais enfin, il suffisait de lui faire toucher de l'argent ou tremper la main dans l'eau bénite pour qu'on s'aperçoive qu'elle était humaine. Des épreuves simples qui allaient sauver les innocents et punir les coupables et on en parlerait plus.

Alexandra, contre toute attente, grimpa sur l'estrade, se déshabilla sous nos regard ébahis, avant de se verser l'eau bénite sur son corps parfait, prouvant ainsi qu'elle était innocente. Sauf que sur le coup, je n'étais pas certain que c'était à cela que pensaient les hommes présents... J'étais gêné de la regarder et je détournai le regard en rougissant légèrement, avant d’apercevoir Erika, non loin de là. Le Père Salomon intervint alors, s'enfonçant dans sa bêtise en parlant d'Alexandra comme d'une créature impie. Parce qu'elle était nue devant nous, je voulais bien, mais pas parce qu'elle était un loup-garou et c'était pourtant bien le sujet du rassemblement.

Je fus soudain horrifié d'entendre Erika ouvrir la bouche, outrée. Je me figeai, avant de la rejoindre le plus rapidement possible en fendant la foule et lui attraper le bras, en colère et parlai dans un chuchotement pressé :

- Erika, de grâce, tais-toi.

Je repris, plus bas encore :

- Tu ne vois pas qu'il est fou ? Ne lui donne pas une raison de s'en prendre à toi... et à notre enfant.

Je ne supporterais pas qu'il leur fasse le moindre mal. Qu'elle soit déjà enceinte alors que nous n'étions pas mariés était un péché, pas la peine d'en rajouter.

Je n'aurais pas du être étonnée que Jaimie me rabroue sèchement. Il avait peur pour moi, naturellement, peur de la folie de ce détraqué en soutane, mais alors qu'il m'attrapait et me rudoyait durement, je lui jetai un regard de défi, le menton bien haut, avant de me dégager brutalement de son étreinte. Vittoria semblait apeurée elle aussi, mais plus douce que mon frère (et amant), elle réussit à apaiser mon courroux soudain devant l'accès de paternalisme de Jaimie et je me mordis fortement la lèvre pour ne pas exploser et balancer ce que j'avais sur le cœur, me contentant de me détourner de mon frère, boudeuse, croisant les bras sous ma poitrine, un nœud dans l'estomac devant le sort qui attendait les accusés. Il n'allait pas les exécuter sommairement, n'est-ce pas ?

Et contre toute attente, Alexandra entra en scène sous nos regards médusés. Elle fit son petit plaidoyer, avant de se déshabiller avec une sensualité indécente et pourtant fascinante. Quelque part, soudain, je l'enviais. Et je ne pus m'empêcher de jeter un regard à Jaimie, guettant sa réaction, soudain inquiète qu'il la trouve mieux que moi. Jalousie débile, mais présente. En attendant, Alexandra venait de prouver de façon éclatante que tout cela n'était qu'une vaste mascarade sans queue ni tête.

Mais cela ne calma pas le prêtre, qui reprit de plus belle, s'attirant le courroux d'Erika. Ah quand même! Enfin quelqu'un qui osait s'exprime,r même si cela ne fut pas au goût de son compagnon qui réagit exactement comme Jaimie avec moi, la faisant taire. Pff... Les hommes étaient des lâches, rien de moins ! mais peut-être que cela allait instaurer la rébellion dans le cœur des villageois !

Les villageois étaient tous arrivés les uns après les autres, le village était quasiment entièrement rassemblé sur le parvis de l'église. Tout s'était enchaîné très vite, j'avais eu un peu de mal à suivre. Grace avait levé la voix, très vite reprise par son frère et la jeune Vittoria. Je ne les connaissais pas mais j'approuvai totalement l'initiative de Grace. Il ne fallait pas s'écraser devant ce type, il fallait lui montrer que nous n'étions pas des abrutis. Et puis Alexandra, que je connaissais uniquement de vue, s'était avancée et s'était dénudée devant nous tous. J'étais trop abasourdie pour avoir une quelconque réaction. Cependant, elle avait raison de tourner en ridicule cet homme. D'ailleurs, celui-ci s'enfonça encore plus. J'entendis Erika élever la voix, elle-aussi, et vis mon frère se glisser près d'elle pour la faire taire.

Je lançai un coup d'œil à Annabelle, elle avait l'air très alarmée par ce que projetait le Père Salomon et ne cessait de jeter des regards au jeune Red Riding Hood accusé, Lewis. Je m'éclipsai et me faufilai jusqu'à Erwan, installé en première ligne. Il ne me jeta pas le moindre regard mais ce n'était pas grave. D'ici je pouvais mieux voir ce qu'il se passait. Je dardai un regard noir sur le Père Salomon, hésitant à réagir moi aussi. Si les choses empiraient, je ne serais sûrement pas la seule à exprimer haut et fort ma façon de penser.

Me tenant à l'écart, dans l'ombre, je regardais d'un œil critique la scène qui se déroulait. Je n'étais que pour être sûr que cette insupportable Salomon n'est pas fait l'erreur de m'ajouter à sa liste, qui semble-t-il a été totalement fait par hasard. Il n'avait mit qu'une seule louve et encore cela devait d'abord être dû au travail d'Heaven qu'elle fut noter dessus. Je scrutais chaque visage et mis à part, quelques crétins de villageois, ce qui ressortait le plus était la colère qui grondait sourdement. Des femmes s'en prirent verbalement au père Salomon, mais ce n'était que des femmes. Leurs impacts étaient médiocre pour un homme tel que ce fanatique. Je jetais un léger coup d’œil à Heaven qui semblait avoir perdu toutes couleurs, son anxiété était trop palpable rien que par ça on pouvait voir qu'elle était vraiment une louve puisque les autres de la liste avaient tous affiché une expression de pure colère.

Reculant légèrement, je viens me glisser au près de Gabriel qui était resté en retrait. Me penchant à son oreille, je lui demandais s'il avait pu s'occuper de l'eau bénite de son père qui était pour l'heure enfermé dans l'église. J'avais préféré courir aucun risque et user de toutes mes cartes pour palier toutes éventualités. Gabriel me murmura tout bas qui avait chargé un jeune enfant de chœur de s'occuper de ça pour lui, en lui donnant sa clé, ainsi il ne restait plus d'eau bénite, à part celle que venait de déverser dessus Alexandra. Hochant imperceptiblement la tête, je repris ma place initiale. Le père Salomon ne pourrait plus rien faire à ce niveau-là.

Attendant la suite, mes yeux naviguaient sur la silhouette de Destiny espérant qu'elle ne ferait rien de répréhensible. Puis avisant Sixte, je n'hésitais pas à venir à ses côtés malgré la froideur récente de notre relation, nous restons des loup-garous avant tout et il est de bon ton de se tenir informer quand l'en s'en prend à l'un des notre. De toute manière, je restais son créateur.Ainsi je lui glissais avec voix basse pour n'être audible que par lui: "J'ai réglé le problème de l'eau bénite grâce à ton amoureux transi, quelqu'un s'est occupé de l'argent ?"